Hell’s Gate – La porte de l’enfer

L’Enfer… terrifiant monde souterrain de pénitence éternelle. Enfer grec d’Hadès, Enfer judéo-chrétien tout en flammes et en démons cornus,  8 enfers brulants et 8 enfers glacés du bouddhisme…. L’Enfer fascine, dans toutes les cultures. Ce monde là, quelque part sous nos pieds, parait plus proche que tout royaume des cieux.

Et beaucoup ont vu sur Terre de potentielles entrées vers cet au-delà macabre. Lac Averne en Italie, cap Ténare en Grèce, où selon la légende, Orphée descendit en vain chercher sa belle Eurydice…

J’ai découvert ce week-end une autre de ces portes supposées séparer le monde des vivants et celui des morts. Je vous présente donc : Hell’s gate, la porte (kenyane) de l’enfer.

Introduction musicale de circonstance:

A propos d’Highway (autoroute), la route qui sort de Nairobi en direction de la valle du Rift en est un, d’enfer. Des nids de poules (qui se rapprocheraient plutôt de nids d’hippos), des conducteurs de matatus complètement givrés, des ânes et moutons suicidaires… C’est simple, on a vu deux accidents mortels sur le trajet, ça calme.

Pour replacer les choses dans leur contexte, le but de l’expédition était de profiter du week-end pour aller faire du VTT dans un parc naturel proche du lac Naivasha.

L’équipe de choc de l’aventure, ses points forts, ses points faibles :

Clochette :      

+ :  Motiv’ ++ (Grande Instigatrice du voyage), tient chaud la nuit, reine de la chanson pourrie

- : Reine de la chanson pourrie, a peur des hippos la nuit, peau de bébé nordiste mal adaptée pour résister à l’enfer

Graham :

+ : A dû être conducteur de rallye dans une vie antérieure, accent charmant, humour anglais

- : Tellement grand que c’est mission impossible de trouver un vélo à sa taille, humour anglais, anglais tout court

Oliv’:

+ : Heureux détenteur d’un pick up, sens de l’humour acéré, grand amateur de Tusker

- : Impossible à suivre à la Tusker, sens de la taquinerie hypertrophié, tendance sadique à empêcher les gens de dormir

Et moi :

+ : Amatrice de chansons pourries, réceptive à l’humour de merde, résistance relative à la Tusker

-: Est un vrai glaçon la nuit,  n’a toujours pas compris qu’il faut appliquer plusieurs fois la crème solaire dans ce pays, grosses lacunes comme photographe.

Maintenant que le décor est planté, qu’est ce qu’on a bien pu faire de notre week-end (bordel) ?

On est allés planter la tente au bord du lac Naivasha, dans un petit camping bien sympathique, mais où il fait un peu froid la nuit, et où on entend les hippos faire un barouf du diable. Mais on y trouve de bonnes pizzas et des tuskers en veux tu en voilà.

Et le lendemain, après avoir loués nos VTT, on s’est dirigés vers la Porte de l’Enfer.

Hell’s gate est un parc naturel qui a quelques particularités intéressantes, qui compensent largement l’absence des big five en son sein. On peut s’y balader à pied et à vélo, les paysages sont fantastiques, et il est traversé par une rivière et des gorges impressionnantes.

Ça faisait longtemps que je n’avais pas fait de vélo, si on exclut les virées retour-à-vélib-pour-cause-d’heure-tardive. Mais malgré ça (et les 2000 m d’altitude), je n’ai pas trop souffert. C’est peut-être les zèbres, girafes et autres phacochères au bord de la route qui mobilisaient mon attention. J’imagine que vous ne croisez pas ca quand vous partez en balade du dimanche à Palavas/Fontainebleau/Perpette-les-olivettes :

On a opéré une scission stratégique. Pendant que les garçons partaient faire la virée « 40 km en montée sous le cagnard et tu t’arraches la gueule » (option somme toute très masculine), Clochette et moi on a préféré y aller cool, et partager notre temps entre vélo et rando.

Apres quelques km, on s’est trouvé un guide pour aller faire notre descente des gorges (soit 4 heures de balade).

Première attraction : la « tour du dieu », une sorte de cheminée des fées volcanique qui se dresse juste à l’entrée des gorges.

A partir de là, les galères commencent. Ce n’est pas qu’il y ait beaucoup d’eau, mais bon, par définition, des gorges, c’est pentu (et glissant). Mais tellement beau ! On passe dans des recoins où, parait-il, des scènes  de Tomb Raider II ont été tournées (un fan de Lara pourrait-il me confirmer dans l’oreillette ?). Au fur et à mesure que l’on descend dans les gorges, l’eau se réchauffe : des sources chaudes jaillissent d’un peu partout. Sympa la douche, mais il faut faire attention où on met les pieds : certaines sont suffisamment chaudes pour faire cuire un œuf.

La descente se poursuit, le paysage change, les falaises s’éloignent. Ça a un côté ardéchois comme ambiance. C’est toujours magnifique (et un paradis de géologue) ; franchement, c’est loin d’être l’enfer. Question au ranger qui nous accompagne : mais alors pourquoi donc appeler l’endroit « Hell’s gate» ? La réponse ne va pas tarder.

On s’éloigne doucement du lit principal de la rivière, et on trouve sur notre chemin des marmites bouillonnantes et fumantes. Ça sent le soufre, même les roches sont chaudes. Et au détour d’un rocher, le fameux spectacle infernal. On comprend sans peine comment les gens imaginent la proximité de quelque chose de maléfique à quelques mètres sous le sol. Un bruit de chaudière diabolique résonne. Dans des cavités du sol, de l’argile blanche, rouge et rose est en ébullition et éclate en bulles sulfurées. D’épais nuages blancs sortent de la terre, en expulsant au passage eau et cailloux. Bref, c’est trop cool. Et en plus, ça fait hammam gratuit.

Une fois qu’on a bien fait joujou, il est temps de revenir à notre point de départ, mais en passant par les falaises, cette fois. Ascension fatigante, mais qui offre un point de vue incomparable. On croise quelques masaïs, on retrouve les vélos et les colocs, et on prend le chemin du retour.

Lumière superbe, c’est l’heure où les animaux viennent boire… et le signe qu’il faut qu’on reprenne la route de Nairobi…